Giles Hedley |
Vendredi 5 mai et samedi 6 mai a eu lieu deux soirées uniques.
Giles HEDLEY et Christophe PELISSIE jouent le Blues, mais pas n?importe quel Blues. Il s?agit du Blues traditionnel, le Blues du Delta.
On ne sait définir avec exactitude les origines de cette musique, mais ce qui est sur c?est qu?après une si grande traversée dans les âges, une si longue, et quelques fois, si douloureuse existence, le Blues traditionnel est toujours présent dans la mémoire collective. Et on ne peut que se réjouir que cela se passe en France et encore plus lorsque cela se passe à Rouen.
Ces soirs là, j?ai rendez-vous avec une grande partie de l?équipe de vos serviteurs (l?Oreille Bleue). Nous avons rendez-vous dans un café comme il en reste peu à Rouen. Authentique, fidèle à la mémoire des bistrots d?antan, haut de plafond, une salle de 30 à 40 couverts dont les habitués se retrouvent régulièrement. Une ambiance chaleureuse, détendue, un accueil convivial, c?est en tout cas le parti pris que tient tous les jours le maestro du lieu, Michel MALCKOWIAK, ancien responsable de communication, puis journaliste. Michel aime la musique ; plutôt sélectif dans ses choix il reste très ouvert. « J?attache une grande importance à distiller pour ma clientèle des soirées à thèmes de qualité ». Bien lui en pris car les quelques privilégiés qui ont réservé leurs places au café de l?époque se souviendront longtemps de cette tranche de vie particulière.
D?une voix chaude, d?un timbre profond, d?une passion résolument traditionnelle, l?homme qui se présente au public est très attachant, simple, généreux et affublé d?un humour très british ce qui ne gâche pas la fête. Citoyen britannique, Giles HEDLEY 60 ans a déjà fréquenté la scène rouennaise, notamment au Bateau Ivre et à la Traverse. Habitué des scènes anglaises où il réside, l?artiste n?est autre que le réfèrent du Blues traditionnel outre - Manche.
De nombreuses émissions de radios, de nombreux festivals, il n?en finit pas de mener en solo ou avec son groupe The Aviators, sa route tout au long du circuit blues en Angleterre et en Hollande, se retrouvant sur les mêmes scènes que Mike SANCHEZ ou Nine Below Zero entre autres. Etonnement, Giles n?a pas encore croisé la note bleue sur les scènes U.S.
Les années 80 sont décisives pour lui, le Blues ne fait pas vivre son homme, il vend même ses guitares. Une rencontre inespérée avec Bob Morgan, lui a ouvert alors un autre horizon?.. Et quel horizon !
Dans les années 90, une nouvelle rencontre avec Christophe PELISSIE agit comme un coup de c?ur. Christophe ou Pélo, rouennais, est déjà très connu dans le milieu de la musique, guitariste de Rock en Stock pendant quelques années, puis guitariste du groupe Infernal Blues Machine. « Pélo?. c?est un guitariste impressionnant de talent, une usine à fabriquer les notes sur le manche de sa guitare » se rappelle Michel, le patron, qui depuis longtemps déjà a dans l?idée de remettre sur scène celui dont Giles HEDLEY ne tarit pas d?éloge : « Christophe est un guitariste de génie? »
Peu avant 21h00, c?est Giles HEDLEY qui débute le 1er set pour une trentaine de minutes. Une demie heure pendant laquelle le public de connaisseurs qui constitue la salle, commence à prendre la mesure du talent de ce personnage.
Seul, assis face au public, sa guitare en mains, qu?elle soit de six ou de 12 cordes, son goulot de bouteille de cidre au doigt, accompagné à l?occasion de son harmonica. Le son grave d?une voix puissante et rude donne le ton en quelques instants. Incontestablement, nous allons assister à un grand moment de blues.
Puis c?est le temps du dîner, savoureux dîner, fait de finesse, de recherche, de création concocté par le chef de cuisine Jean Pierre RIMPAULP, un vosgien, l?un des trois meilleurs choucroutier de France, classé 3ème derrière les plus grands noms de notre cuisine française, j?ai nommé Mrs. BOCUSE et les Frères TROISGROS excusé du peu, et qui officie pour le plus grand plaisir des convives au Café de l?Epoque. (à quand la soirée choucroute ?)
Après le dîner, le deuxième set démarre. Giles HEDLEY libère tout son talent, un jeu de guitare authentique, subtil, une voix venue des profondeurs de l?âme, la salle revit alors l?émoi du Blues du Mississipi. (R. Johnson- Son House ? Sonny Boy Williamson II, Willie Mc Tell) leurs âmes planent au dessus de nos têtes. C?est l?extase! Mais le maître, m?en bouche un coin lorsqu?il se mets à jouer de son harmonica (de ses harmonicas devrais-je dire, basse dans la bouche et traditionnel sous la narine !) non seulement l?artiste excelle au chant, à la guitare, mais il est aussi un fameux harmoniciste, un spécialiste du jeu nez - bouche et croyez moi, il faut l?avoir vu pour le croire. Vraiment impressionnant, d?une prouesse technique que je n?ai encore jamais vu à ce jour!
C?est au cours de ce 2ème set que Giles invite Christophe PELISSIE pour un jeu à deux guitares, l?un accompagnant, l?autre chantant et lui répondant de ses accords précis, et comme si il ne s?agit là que d?une représentation entres- amis, Christophe se permet même quelques accompagnement au piano entre deux accords de guitare. Quel régal? Bien évidemment c?est sous un tonnerre d?applaudissements que sont demandés les rappels.
La soirée de samedi se passa de la même manière, à la différence prêt, que j?ai observé une salle extrêmement attentive, où pas un bruit n?a fusé au cours du 2ème set. L?esprit de ce Blues si riche et si rude est entré en chacun des convives.
Autant dire que ces soirées ne sont que plus révélatrice d?un immense talent et pour ceux qui ont eu le bonheur de réserver leur table à cette occasion, ce fut un grand moment.
Cet artiste très humble est sans doute le plus grand Bluesman Européen qu?il m?a été permis de rencontrer.
| Giles Hedley et Christophe Pélissié |