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Les Bordelais sont tout de même de sacrés veinards ! Non contents de vivre dans une capitale gastronomique et vinicole, d?avoir une équipe de foot performante, un climat à la douceur reconnue, ils peuvent également s?enorgueillir d?avoir une des scènes Blues les plus vivantes et les plus talentueuses de France. Il suffit pour s?en persuader d?énumérer la liste des artistes originaires de la scène girondine : Julien Brunetaud, Anthony Stelmaszack, Mr Tchang, les Flyin? Saucers? Impossible quand on évoque ce formidable vivier de ne pas s?arrêter sur ce personnage hors norme qu?est Lonj. Fin connaisseur et formidable interprète d?un Blues respectueux de ses racines, férocement jaloux de son indépendance, il s?est volontairement tenu à l?écart du circuit Blues français ce qui ne l?a cependant pas empêché de sortir six albums en quatre ans ! Pas mal pour un type qui derrière une apparente nonchalance fait preuve aussi bien sur disque que sur scène d?une formidable et communicative énergie! La sortie de son nouvel album (chroniqué sur ce même site) intitulé « I Found Out » était l?occasion pour nous de faire plus ample connaissance avec ce digne héritier d?une de ses influences majeures : John Hammond Jr.
Pour commencer, peux-tu décrire un peu ton parcours musical et nous expliquer d?où vient le pseudonyme de Lonj ?
J'ai commencé à jouer du Blues à 18 ans (j'en ai 34 aujourd'hui). J'ai participé à quelques groupes sur Bordeaux avec des potes dont certains que tu connais comme Anthony Stelmaszack et Mig Toquereau. Ensuite, j'ai pas mal joué dans le pays basque derrière Denis Flaichez Quéguiner. C'est là que je suis passé « pro ». Puis il est parti jouer avec les Rosebud Blue Sauce et je me suis enfin décidé à leader. J'avais des amis qui m'appelaient Lonj parce mon vrai nom c'est Coulonges et qu'ils trouvaient que j'étais bien assez cool comme ça. J'ai donc gardé ce pseudo et j'ai formé « Lonj et les Shufflemaniacs ». On a beaucoup tourné en trio pendant trois ans. Parallèlement, je jouais de plus en plus en solo. Toutes ces expériences ont été vraiment enrichissantes, mais aujourd'hui, je n'ai plus de groupe fixe et je ne tiens plus vraiment à en avoir. Je préfère être indépendant.
Quelles sont tes principales influences musicales ?
John Hammond, Muddy Waters, B B King, Dave Van Ronk, John Lee Hooker, Lightnin' Hopkins, Tony Joe White, Magic Slim, Hound Dog Taylor, Robert Johnson, Blind Willie McTell... Il y en a vraiment beaucoup ! Et puis, aussi quelques musiciens que j'adore même si ce qu'ils jouent est très différent : Al Green, Nina Simone, Jeff Buckley...
Ton nouvel album (« I Found Out ») vient de sortir. Où et avec qui tu as enregistré cet album et quelles ont été les conditions d?enregistrement ?
Même si le disque est sous mon nom, c'est un travail collectif et je dois rendre hommage aux gens qui y ont participé. Bo a joué la batterie et Roland Dubois (Jelly Roll) m'a ouvert les portes de son home studio à la campagne, ce qu'il ne fait que pour les amis. On a enregistré trois jours. Bien sûr, je n'avais rien préparé... Mais on a passé un super moment tous les trois à faire de notre mieux (et aussi à se faire des bons repas). Ensuite, il y a eu tout le travail de mix qui a été fait par Nicolas Domenech avec un talent et une patience incroyables. Et puis la belle pochette réalisée par Claude Cachin. Je ne pouvais pas rêver de meilleures conditions ni de meilleure équipe et j'espère qu'on va se refaire ça bientôt.
Sur les onze morceaux que compte l?album, on trouve sept compositions personnelles. Comment s?est opéré le choix des morceaux, et en particulier des reprises?
J'ai eu la chance de rencontrer la petite-fille de Mississippi John Hurt à Avalon. Elle voulait que je lui joue un morceau de son grand-père. Alors, j'ai chanté « Make me a pallet on your floor ». Elle était très émue (moi aussi !) et j'ai dû lui promettre de l'enregistrer. Pour les autres morceaux, c'est plutôt le hasard ou bien l'inspiration du moment... J'ai écrit deux morceaux la veille du studio et deux dans la matinée avant d'y aller. La seule chose que je savais, c'était qu'il y aurait de l'acoustique et de l'électrique.
L?intégralité des onze titres de ton album a été enregistrée soit en duo, soit en solo. Même s?il t?arrive de jouer en groupe (avec Anthony Stelmaszack ou encore Mr Tchang), je sais que ce sont des formules que tu affectionnes. Envisages-tu toutefois de te produire un jour sous ton nom sur CD ou sur scène avec une formule bien plus étoffée comprenant par exemple clavier et cuivres ?
Pas du tout ! J'aime être le plus libre possible dans la vie et sur scène.
Comment faire pour se procurer ce nouvel album et ceux sortis précédemment?
Je suis en train de voir pour une distribution mais en attendant, le mieux est de me contacter par mail :lonj@voila.fr. Et je précise aussi que ce nouvel album ne coûte que 10 euros !
Sur ton premier album (« Lonj Solo »), paru en 2004, figurait une magnifique reprise de « I?ll Be Your Baby Tonight », chanson écrite par un artiste que tu apprécies particulièrement : Bob Dylan. Serais-tu tenté de consacrer un jour ou l?autre un album entier à ce monstre de la musique ?
Cette chanson, je l'avais en tête pendant un voyage. J'étais parti sans musique avec moi, mais avec une guitare et je ne sais pas pourquoi, mais il fallait absolument que je la joue... Quant à faire un disque entier de morceaux de Dylan, ce serait vraiment intéressant mais je ne suis pas sûr de son succès...
Sean Costello partageait également cet immense respect envers Dylan. Un mot sur cet artiste qui vient de disparaître brutalement à l?âge de 28 ans.
Comme beaucoup, j'ai été saisi par le talent de Sean. J'aimais la volonté qui se dégageait de lui quand il jouait et chantait. La première fois que je l'ai vu, il était tout jeune (23 ans peut-être) et c'était vraiment Blues ! Tous les gens qui l'ont rencontré l'aimaient.
Tu as eu l?occasion de pas mal voyager au cours de ta carrière musicale avec des périples au Proche Orient et surtout aux Etats-Unis. Qu?as-tu retiré de ces expériences ?
Je suis allé à Oman et en Jordanie. Et aussi en Australie et bien sûr aux Etats-Unis (New York et Mississippi). Ce n'est pas évident de définir ce qu'apportent les voyages... Mais pour parler de musique, voyager avec une guitare, ça change tout. On a un contact direct avec les gens et je crois bien que je ne me suis jamais autant réjoui d'être musicien qu'à l'étranger. Ca m'a aussi rendu un peu plus contemplatif et c'est vrai que maintenant, j'adore me balader quand je vais jouer quelque part ce qui est souvent possible quand on tourne en solo. Et bien sûr, ça m'a fait progresser en anglais !
Tu as croisé pas mal de bluesmen sur ton chemin lors de tes séjours aux USA. Quels sont-ils ? Qu?as-tu appris d?eux ? As-tu gardé contact avec certains ?
J'ai fait trois séjours dans le Mississippi. Le premier avec l'asso Bordeaux Delta Blues. On a formé le Bordeaux Blues Connection Band pour l'occasion avec Yvan Aucouturier, Anthony Stelmaszack, Fabrice Bessouat et Julien Brunetaud. Les deux autres en solo. Pour citer quelques temps forts : la rencontre avec B B King. C'est bien plus qu'un bluesman. C'est une sorte de patriarche bienveillant qui aime les gens et que les gens aiment. Faire la basse avec Sam Carr à la batterie et aussi être reçu chez lui avec Julien. Il nous a montré les instruments de musique de Frank Frost et nous a raconté plein d'anecdotes. Inviter T-Model Ford sur scène et finalement faire tout le concert avec lui. Et aussi la messe dans l'église d'Al Green ! Difficile de faire un bilan précis sur ce que j'en retiens mais de manière générale, on peut dire que la musique là-bas est quelque chose de très naturel et surtout que c'est un partage. Bien souvent, quand on sort un disque, qu'on défend un projet ou autre, c'est là qu'on se perd parce qu'on oublie l'essentiel : on joue pour les gens !
Pour finir cet entretien, un mot sur tes projets à venir pour l?année 2008. Tu seras cet été notamment au Festival Blues Passions de Cognac.
En effet et ça me fait bien plaisir. Je participe aussi au festival de Cahors et j'ai quelques dates sympas en général. Je suis aussi sur un autre disque qui sortira avant cet été, mais je n'en dis pas plus. En tout cas, j'étais resté en dehors du « circuit Blues » pour l'instant alors je vais essayer de faire bonne impression, mais sans oublier ce que je t'ai dit il y a quelques instants : jouer pour les gens... |
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