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Laurent Hovray: De l'eau à couler sous les ponts depuis notre rencontre au début de l'année lors de votre passage à Tremblay, quel a été le programme estival des "Flyin'" ?
Fabio Izquierdo : En fait, nous avons passé une longue année de transition. Anthony Stelmaszack nous a quitté en septembre 2004. Il souhaitait évoluer vers un autre répertoire et a rejoint Julien Brunneteau . Les emplois du temps des deux formations n'étaient plus compatibles et un choix a dû être fait. Il n'a pas été facile pour nous de le remplacer et cela nous a pris un an après quelques essais. Nous avons par l'intermédiaire de Fabrice Bessouat (notamment batteur de Julien) rencontré le type qu'on cherchait, qui puisse être à la fois un accompagnateur et un leader, un gars qui soit aussi efficace que Anthony à la guitare, bon chanteur et disponible, avec lequel la relation humaine soit au top. Nous élargissons donc notre recrutement au niveau géographique, ce " petit nouveau " étant de Toulouse. Il s'agit de Fabrice Joussot et sans aucun doute, ce mec va plaire à beaucoup de monde. On espère juste que pendant cette année de transition, on ne nous a pas oublié. Les " reprises " de contact avec les programmateurs sont tout de même encourageantes. Quoi qu'il en soit, ce mec est vraiment super et les quelques concerts en club qu'il a fait avec nous sur la rentrée ont vraiment séduit le public, les programmateurs et les collègues qui jouent dans d'autres formations.
L.H : Tout cela à l'air encourageant pour l'avenir, mais vous n'êtes quand même pas rester les
bras croisés durant cette période ?
F.I : Les quelques dates avec les Flyin' se sont on va dire bien passées, même s'il ne s'agissait que de clubs à cause de ce line up qui ne se fixait pas réellement. On va dire que nous avons surtout bossé avec nos autres formations. Cédric et Stéphane avec Mister Shaker, Cédric avec les Old Bluesters, Stéphane avec Malted Milk et des formations jazz, Charly avec Rio Grande en country et Ricky Norton en rockabilly et moi en duo avec Lonj, Anthony ou ce nouveau guitariste. J'ai fait aussi quelques régies dont la tournée avec Little Charlie & the Nightcats (sans Little Charlie mais avec Rusty Zinn)
L.H : Parlons de vous plus en détail, une petite présentation des "Flyin'saucers" version 2005 s'impose :
F.I : Donc nous aurons pour 2006 toujours les mêmes sauf ce nouveau guitariste, à savoir Cédric le Goff à l'orgue et au chant, Jean Charles Duchein à la basse et au chant, Séphane Stanger à la batterie, le petit dernier Fabrice Joussot à la guitare, national et chant et moi même Fabio Iquierdo à l'harmonica, rubboard et chant.
L.H : A quand remonte sa création et pourquoi avoir choisi ce nom ?
F.I : La création de l'équipe date de fin 97. Le nom vient d'un instrumental de Little Walter que nous souhaitions jouer mais que nous avons jamais réussi à faire sonner. En pied de nez, ce nom est resté. Et puis comme disait Charly arrivé dans le groupe en 2000, il nous convient bien avec notre répertoire un peu " wizz " et l'état d'esprit de la formation.
L.H : quel a été le parcours de la formation depuis ses origines ?
F.I : Comme je le dirais jamais assez, on a eut la chance de faire nos premiers pas au Cricketers à Bordeaux où je bossais avec certains des Mudzilla. Ça facilite pas mal de chose outre musicalement, ça ouvre plus facilement les portes, tu connais plus de gens et puis c'était une espèce de label. Rapidement, on s'est retrouvés dans le circuit des festivals et les contacts établis avec certains groupes français ou étrangers nous ont permis de servir de line up pour certains d'entre eux, donc d'accéder à des scènes ou des tournées très intéressantes. En ce qui concerne les distinctions nous avons eu plusieurs nominations aux Trophées France Blues et gagné en 1999 le Tremplin Blues sur Seine. Certes, la musique n'est pas un concours mais cela fait plaisir d'obtenir une certaine reconnaissance et sa aide à la notoriété. Il y a eu des moments forts comme accompagner en tournée des mecs comme Amos Garret, Paul Orta ou Bill Hurley.
L.H : musicalement, vous tissez un véritable patchwork des différentes composantes du blues, un choix délibérer ou dû aux influences et goûts des musiciens ?
F.I : Les deux. Mais surtout, nous n'avons pas envie de nous enfermer dans un style de blues particulier. C'est pourquoi nous puisons nos influences principalement dans les musiques apparentées " blues de Louisiane ", rock'n'roll et ce depuis la création de la formation. Pas mal de gens sur les débuts nous attendaient plus sur un répertoire Chicago Blues ou swing, mais quitte à écouter du Muddy Waters par exemple, on trouvait plus intéressant d'envoyer les gens écouter les originaux que de leur jouer. C'était en plus à ce moment un créneau pas autant exploré qu'aujourd'hui. On est allés vers un répertoire plus " rigolo ", plus festif et aussi peut être plus grand public comme certains nous l'ont un peu reproché. On pourrait en parler plus longuement mais bon. Et puis ce patchwork permet aussi de nous exprimer dans tous les registres musicaux qu'on aime chacun de notre côté. On défini notre répertoire comme un mélange de musiques qui puisent leurs racines dans le blues, ça nous emmène dans tous ces univers qu'on aime. Si certains veulent absolument cataloguer notre mixture dans du blues ou non, qu'ils le fassent, mais sans vouloir nous comparer à eux, quand on écoute Doctor John ou Professor Longhair, est ce que c'est important de savoir s'ils font du funk, du blues, de la rumba ou du rock'n'roll à partir du moment que l'on s'éclate en les écoutant ?
L.H : Quels sont vos idoles ?
F.I : Trop nombreuses et tellement différentes les uns par rapport aux autres pour développer ici.
L.H : Vous vous contentez d'un répertoire de bonnes vieilles reprises ou vous consacrer du temps à la composition ? Si cela est le cas, lequel d'entre vous en prend les responsabilités ?
F.I : Le répertoire est 50/50 compositions et reprises et il n'y a pas de règles vraiment établies pour le travail sur les compositions. En fait, lorsque Cédric propose un morceau, il sait en général exactement ce qu'il veut et les autres membres du groupes apportent vraiment que de petites touches au niveau de l'arrangement. Autrement, c'est le système démocratique qui l'emporte. Les textes sont amenés par qui souhaite en proposer avec une idée de riff ou de tourne et chacun apporte sa pierre à l'édifice, le résultat est beaucoup plus intéressant comme ça et tout le monde s'implique.
L.H : D'ailleurs, parles nous un peu de vos albums et peut être en avez vous
un en projet qui se profile ?
F.I : Pour l'instant, nous avons réalisé trois albums. Le premier " Blues Attack ! " a été fait très rapidement à la naissance du groupe. Il s'agissait plus d'une carte de visite démo qu'autre chose mais il a fait parler de lui à cause de sa jaquette pastiche du premier album des T.Birds et son côté déjanté ; on y trouvait aussi bien du blues que du rock'n'roll et des cumbias. Le second " bon ton roule " a été enregistré au festival de blues de cognac en 99. Il devait sortir en même temps qu'un album studio qui n'a jamais vu le jour puisque à la fin de cette session live, Cédric Le Goff intégrait le groupe en tant que nouveau chanteur. Nous avons gardé le projet de l'album live qui a été mixé en premier, il permettait de faire une transition en douceur avec ce nouveau line up tout en décrivant l'état d'esprit du groupe sur scène et surtout d'aller au bout d'un projet sans décevoir celui qui l'avait initié, à savoir Michel Roland qui nous a laissé carte blanche et soutenus à fond financièrement et moralement. Et puis, sans cette soirée, on aurait peut être jamais pensé à Cédric pour intégrer l'équipe, il se trouvait là en tant que festivalier, on lui a proposé de nous rejoindre sur scène puis de signer avec nous. Cet album est très " blues " dans l'esprit suite à son lieu d'enregistrement mais a aussi une partie zydeco avec quelques invités dont Pascal Lamige à l'accordéon et Arnaud Fradin. Enfin, le dernier en date est " Radio Gumbo ", un album sur lequel nous avons voulu nous faire plaisir en y intégrant tous les styles de musiques que nous explorons avec une petite explication de texte sur chacun des morceaux pour renvoyer à ceux qui nous les ont inspirés. Même s'il a été réalisé de façon morcelée à cause des emplois du temps de chacun, nous nous sommes beaucoup amusés à le l'enregistrer. On y retrouve Paul Orta à qui Benoît Blue Boy a filé un coup de main parce qu'il voulait adapter Sugar Bee en français et pas mal de musiciens bordelais dont des violons de l'Orchestre National Bordeaux Aquitaine pour les morceaux tex mex.
Maintenant que l'équipe est stabilisée, nous allons enfin pouvoir nous atteler au suivant et ça fait quelques temps qu'on y pense chacun de notre côté. Personnellement, je pense qu'il sera à l'image de ce que l'on joue sur scène actuellement, c'est à dire très influencé par le rock'n'roll / blues 50's 60's de Louisiane. Mais d'ici là, on peut encore changer d'idée.
L.H : Revenons à votre prestation lors de votre passage à Tremblay en première partie de Mémo Gonzalès, vraiment sympa cette soirée n'est-ce pas ?
F.I : C'est de toutes manière toujours sympa de se retrouver sur scène avec les Bluescasters, et puis quand on monte sur la capitale et dans ses environs, le fait qu'on retrouve des gens que l'on croise sur les festivals d'été et avec qui on tisse des liens nous fait vraiment plaisir. Les deux formations avaient de toutes manières envie de prendre beaucoup de plaisir cette soirée là parce que c'était la dernière date de cette petite tournée.
L.H : Le fait de passer en première partie de grosses pointures comme Mémo, doit avoir sur votre façon de mener votre set un effet euphorisant ?
F.I : Franchement, je ne pense pas. Nos sets ont toujours un seul objectif, faire en sorte que les gens en face passent un bon moment en notre compagnie tout en nous amusant de notre côté. Après, le challenge est différent, sur une première partie, le public ne vient pas dans sa majorité pour nous voir et ne nous connaît pas forcément. Pour ce public c'est comme une espèce de salle d'attente chez un médecin, le temps te paraît moins long si t'as des revues intéressantes à feuilleter, à nous de faire en sorte que la lecture soit bonne, voire, qu'ils piquent quelques revues avant la consultation avec la tête d'affiche.
L.H : On a senti une grosse complicité entre vos deux formations par le fait d'avoir fait plusieurs dates ensembles, vous arrive-t-il de garder des contacts amicaux après coup ?
F.I : En fait, avec Memo et les Bluescasters, on se connaît depuis l'époque du Cricketers où nous avons vraiment tissé des liens très amicaux. La complicité vient surtout de ce fait et puis ce n'était pas la première fois que nous proposions ce genre de plateau avec eux. Pour résumer, on s'entend très bien, nous avons des répertoires qui malgré leurs différences ne sont pas vraiment si éloignés l'un de l'autre, on aime bien faire la route ensemble. De plus, le fait que nous leur donnions un coup de main pour trouver des gigs en France les arrange et nous y trouvons notre compte pour nous faire connaître auprès d'un public qui ne se déplace pas forcément pour aller voir des groupes français. Enfin, sur scène, la formule fonctionne vraiment bien entre les deux groupes. C'est une opération que nous relançons d'ailleurs pour 2006.. Avis aux amateurs
L.H : Et la famille blues française, vous y avez des affinités ?
F.I : Bien sûr, il y a des gars avec qui nous nous entendons très bien, dont nous apprécions le travail. Mais ça reste une question de goûts et de feeling.
L.H : La scène qui m'a tout l'air d'être votre terrain de prédilection, vos meilleurs et pires souvenirs, des anecdotes ?
F.I : C'est en effet plus sur scène que l'on se sent bien qu'en studio ou tu es néanmoins obligé de passer pour maintenir une certaine actualité. C'est un cercle vicieux de toutes manières. pas de disque, moins de scène, moins de scènes, moins de moyens pour réaliser un album. C'est quoi qu'il en soit le terrain de prédilection de tous les groupes qui font ce style de musique, elle est faite pour guincher ou communiquer des sentiments en live plus que sur une galette ; c'est tellement plus amusant de jouer avec des gens en face et d'instaurer un dialogue. Concernant les bons et les mauvais souvenirs, je pense que dans le groupe, chacun a les siens. En ce qui concerne les bons, je garde en mémoire l'enregistrement du live à Cognac, un concert chez Emmaüs dans le cadre de Blues sur Seine, un concert à Pornic avec les Bluescasters, la tournée avec Amos Garrett et une série de folie où un soir nous jouions dans des arènes près de Madrid et le lendemain au Luxembourg, galère dans l'organisation mais tellement fiers de l'avoir fait. Concernant les pires, on va zapper tous les sales plans que tout le monde connaît concernant les supers accueils de certains soit disant clubs où on te file un sandwich en guise de repas avant de te demander de faire le juke box toute la nuit. je pense plutôt à la première édition du festival vent d'Ouest où les responsables ont pris un bouillon financier alors que l'organisation était celle d'un festival qui a dix ans d'existence et nous a accueilli de manière fabuleuse; on s'est sentis mal dans notre peau pour eux et ça reste pour moi un sale souvenir. Mais la palme d'or revient à un festival en Espagne à côté de Barcelone. Pour la petite histoire, nous devions jouer à 17 heures et on nous convoque pour des balances à 9 heures du matin les festivités commençant en début d'après midi. A noter que nous arrivions de Madrid donc nous étions vraiment usés. Pour faire simple, à 10 heures, la scène finissait de se monter, à 11 heures, les techniciens ont abandonné l'idée de trouver avant la fin des balances comment éviter aux groupes de ne pas s'électrocuter sur scène pour des raisons obscures, à midi le son de grosse caisse était fait et à midi trente, il y a eu comme un vent de rébellion sur le plateau. Résultat, à 17 heures, nous avions plus l'impression de jouer pour une techno-rave-machin-bidule que pour un concert de blues. Nous faisions le gig avec Paul Orta ce jour là, le pauvre, il était plus que désespéré.
L.H : Votre bonne ville de Bordeaux dont vous êtes originaires, fleur-t-elle bon le" blues", avec des groupes locaux, des clubs, des festivals...?
F.I : Bordeaux est une ville qui musicalement à des origines très rock à la base avec l'émergence de groupes comme Kid Pharaon, Noir désir et quelques autres qui ont fait des émules. La ville possédait à une époque une pléthore de caf'conc' et de petits clubs. Là dessus en 86 est venu se greffer le Cricketers et vers les début des années 90, avec cet espèce de blues boom dû notamment à " Still Got The Blues " de Moore, " Damn Right I've Got the Blues " de Buddy Guy, SRV que tout le monde avait en tête et les concerts proposés dans ce club, il y a eu une poussée de musiciens et de groupes de blues même si avant tournaient déjà des formations comme celle de Lenny Lafargue ou Art 314 dans un esprit pub rock qui ont aussi donné l'envie de tâter du blues. De là sont nés pas mal de groupes qui se sont formés, déformés et musiciens dont Anthony Stelmaszack, Lonj, Mister Tchang, Mig Toquereau, les Mudzilla, les Flyin' Saucers (même si notre " appar- tenance " n'est plus strictement bordelaise) et j'en oublis. Concernant les festivals, nous avons celui de Léognan et la ville est géographiquement bien placée entre Cognac, Cahors, la Blues station de Tournon, le festival des musiques de la Nouvelle Orléans de Périgueux.. Il y a aussi quelques clubs mais ce n'est plus comme c'était avec le Cricketers . Néanmoins, le Marine Band Club de Bordeaux propose des jams sessions hebdomadaires et un nouveau lieu vient de se créer. Il a été monté par Philippe Combe, ancien du " Crick ". Il s'agit d'une toute petite scène qui est plus un lieu de rencontre autour de la musique qu'une salle de concert compte tenu de l'agencement de la salle. Il devrait néanmoins programmer un concert par semaine mais surtout, il a eu la bonne idée de proposer une formule appelée les Démons de Midi : des concerts acoustiques en milieu de journée durant lesquels les musiciens locaux se retrouvent. Cela risque d'être sympa, une occ- asion pour nous de nous retrouver régulièrement et de jouer dans des formules inédites.
L.H : Quels sont les grands projets à venir des "flyin'saucers" ?
F.I : Réinvestir le terrain avec cette nouvelle équipe dans un premier temps, trouver le financement pour le prochain album. Plus deux ou trois autres trucs dont il est trop tôt pour en parler et nous aimerions bien refaire une tournée avec Amos, mais cela ne dépend pas de nous.
L.H : je te laisse le mot de la fin pour tous nos Amis Normands.
F.I : Merci à Lucky pour sa " médecine " miracle et aimerai bien que les Hoodoomen me règlent leur nuit d'hôtel... Ces mecs sont insupportables ! ! ! héhéhé
Intro : Ils nous ont épaté lors de leur prestation Parisienne en première partie de Mémo Gonzales, tant par leurs qualités musicales et humaines.Une présentation de cette sympathique formation Bordelaise s'imposait, d'autant que Fabio, le charismatique harmoniciste se réjouissait déjà de nous servir d'interlocuteur et de nous parler des "Flyin".
Conclusion : On ne se fait aucuns soucis en ce qui vous concerne, mon cher Fabio : le talent, la générosité et la "grinta" qui vous caractérisent, vous propulseront de nouveau au panthéon des formations blues hexagonales, avec l'espoir de venir un jour vous applaudir dans notre région.
Good Luck les "flyn'"! |
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