7eme Bay Car Blues Festival de Grande Synthe (59)
Devenu en quelques années le rendez vous incontournable printanier de tout amateur de notes bleues qui se respecte, le Bay Car Blues Festival de Grande Synthe dans le Nord continue de briller au firmament et cette 7eme édition n?a pas dérogé à cette règle. A commencer par l?organisation de ses fameuses « Chapelles Blues » (plus nombreuse d?année en année), exclusivité du cru pendant les (six) nuits précédent la programmation officielle, où nombre de musiciens sont invités à se produire chez des particuliers nommés les « Welcomings ».
Présents toute l?année sur la scène Blues hexagonale, qu?ils soient français, britanniques ou américains, les échanges entre chaque artiste s'accordent volontiers avec la convivialité naturelle ressentie dans chaque maison.
Un métissage encore plus prononcé avec la possibilité donnée de s?exprimer à des interprètes locaux, d?autres milieux musicaux (Zouk, R?n?B, Soul et Acid Jazz), prouvent que les « Chapelles Blues » n?ont pas de frontières?
Cette notion d?échanges sincères sur fond d?esprit de fêtes jamais usurpé génère une ambiance incroyable de joies communicatives autour d?excellents produits locaux à boire et à manger sans modération?
De quoi donner des idées à d?autres festivals, il paraît même que le GrésiBlues dans l?Isère (début juillet) a déjà mis en place ses « Refuges Blues » s?inspirant du même principe.
Il faut une fois encore mettre en avant la tâche énorme effectuée par une formidable équipe de bénévoles, âme vitale et cheville ouvrière indispensable au succès d?un tel événement.
Surtout que les bonnes habitudes prises du côté du Palais du Littoral ont dû être abandonnées (pour 2006 et 2007) et qu?il fallut tout reprendre du début dans un nouveau lieu, le vélodrome. Une sorte de renaissance qui pris forme sous un immense chapiteau dans lequel les ingrédients des réussites passées (ambiance cabaret avec tables et chaises, écrans géants sur chaque côté de la scène et grands bars faciles d?accès) trouvent leur place légitime.
Fort de l?expérience emmagasinée depuis sept ans et d?un travail acharné, tout est fin prêt le vendredi 28 sur le coup de 20h30 et le spectacle peut commencer?
A l?instar d?une prestation de haute volée à la Traverse de Cléon en décembre dernier, la perspective de revoir le guitariste américain Alex Schultz promettait d?offrir son lot d?émotions intenses. Un jeu de guitare soutenu, puissant et fluide à la fois, appuyé par la rythmique infaillible de l?organiste Autrichien Raphaël Wressnig, et la dextérité d?un batteur aussi concerné que précieux, fournissent tous les composants d?une musique chaleureuse qui s?aventure dans le Blues, le Swing et la Soul. Cette dernière couleur musicale est plus affirmée et encore accentuée par l?appui non négligeable du saxophoniste de service et surtout par les envolées vocales du natif de New York, Tad Robinson. Un chant raçé, prenant et torride qui stimule le point sensible et fait frémir à chaque vocalise.
Au final, finesse extrême et grande classe résument en quelques mots ce concert et confirment l?impression ressentie à l?écoute des deux derniers albums de Tad Robinson où figurent en bonne place les six cordes d?Alex Schultz.
Le copieux public, venu comme tous les ans en famille, visiblement conquis par une telle entrée en matière va succomber à la représentation enthousiaste de l?Américaine Sharrie Williams entourée de ses fidèles Wiseguys (les Italiens, Marco Ray Franco à la basse et Pietro Taucher aux claviers, l?Allemand Lars Kutschke à la guitare et le dernier arrivé, l?Américain Larrice « Troy » Byrd aux baguettes). A l?affiche depuis quelques années de la plupart des festivals européens de Blues, Sharrie Williams possède une voix d?exception et propose un show énergique et rodé (peut être trop ?) qui séduit toutes les assemblées tant elle joue sur la fibre émotionnelle pour se mettre le public dans la poche? Et cela fonctionne à chaque fois !
Générosité, positivité, sensualité et charisme ne manquent jamais à l?appel d?un cocktail explosif où le Jazz, le Gospel, le Rock et le Blues se font la part belle du répertoire.
Pour l?occasion, c?est principalement la personnalité de sa compatriote Robin Rogers, harmoniciste de son état et chanteuse plus que convaincante qui constitue une agréable découverte et trouve sa place dans l?unité ambiante.
Un somptueux gospel, sensible au possible et plaintif à souhait, en compagnie d?Alex Schultz et de Tad Robinson en guise de b?uf final transmet l?essence même du Blues où
l?idée de partage est omniprésente.
La seconde soirée faisait la part belle aux français avec pour commencer le Rythm?n Blues de Mercy Blues Band emmené par le guitariste chanteur Jean Paul Avellaneda, poussé par la basse de Bruno Quinonèro, les ch?urs de Marie Christine Landmann et Emily Pello, le saxo de Jöel Rémy et, chose rare, de deux batteurs Stéphane Avellaneda et Franck Marco. Je n?ai pas bien compris l?intérêt musical de ces deux batteries puisqu?elles ne se sont que très peu démarquées l?une de l?autre. Par contre les deux batteurs y ont pris un plaisir évident. Le show, à l?image de Jean Paul derrière sa guitare a déployé une quantité d?énergie impressionnante qui couplée au charme des choristes à tout naturellement séduit le public. Une bien belle entame de soirée qui a totalement séduit la salle, mais dont le répertoire m?a laissé un petit goût de baloche.
J?avais vu récemment Fred Chapelier dans la même formation et je ne m?attendais pas à être surpris, erreur. Je ne sais pas si c?est le climat, l?accueil ou le public qui les a bouté mais la prestation a vraiment été de très haut niveau. Et même si Abderr Benachour à la basse, Pat Machenaud à la batterie, Damien Cornélis au clavier et Lorenzo Sanchez à la guitare ont été comme toujours irréprochables et impressionnants de groove. C?est vraiment Fred qui a fait la différence avec les autres prestations que je leur ai vu. Il a assuré un show absolument fantastique, l?énergie, la gestion de la scène, l?intensité la maîtrise de l?instrument, tout était parfaitement géré et même si le solo en « violoning » était un peu long, il était vraiment très réussi et à fait se lever la salle. Le niveau était déjà très haut et le booster n?était plus franchement possible, pourtant Nina Van Horn et Miguel M ont essayé de le faire. Je dirais qu?ils y ont semble-t-il pris plus de plaisir qu?il m?en ont donné mais arrivés à froid dans une telle prestation, il aurai fallu un miracle.
Enfin bref, Bravo M Chapelier je me range enfin derrière les gens qui clament haut et fort que vous être un très grand. J?ai besoin de constater par moi même avant d?adhérer à une idée, c?est chose faite.
Incroyablement, l?ambiance est encore montée d?un cran avec Big Pete Pearson & the Rhythm Room All Stars. Un show bien huilé et parfaitement maitrisé par l?ensemble des protagonists. La salle a été conquise et moi fortement impressionné. D?abord par Big Pete lui même, par la classe qu?il dégage par l?aisance qu?il affiche et par sa voix puissante et profonde. Ensuite par Brian Fahey à la batterie et Patrick Rynn à la basse. Ils ne se sont pas fait remarquer mais leur complicité musicale donne un swing exceptionnel à un répertoire plutôt Chicago. Quel dommage que comme à son habitude, l?incroyable guitariste Chris James se soit totalement effacé au profit des autres membres du groupe et particulièrement de Johnny Rapp à l?autre guitare. D?autant plus que ses quelques interventions m?ont semblé bien plus étonnantes et inventives que celles de son collègue. J?attends maintenant avec impatience qu?il monte son propre groupe. Je n?ai pas prêté une grande attention au clavier de Matt Bishop et j?ai trouvé que Bob Corritore était un bon cran en dessous du reste de l?équipe. Mais à ce niveau là, un cran en dessous, est ce que ça veut encore dire quelque chose.
Troisième et dernière soirée de ce festival toujours riche en évènements musicaux variés. Le très prometteur Charles PASI, récemment entendu à Rouen, démarre le show.
Avec ses vingt printemps et au regard de son talent évident de chanteur et d?harmoniciste, l?avenir lui laisse une large fenêtre afin d?atteindre les sommets de son art. Son timbre, le dynamisme de ses attaques et la musicalité de son chant le place parmi les prochains grands chanteurs français de blues. Ses parties de Honner sonnent très pro et sa maîtrise des aigus rappelle à l?ordre. Stéphane Minana à la batterie, de Jimmy Sofo à la basse et Antoine Holler aux guitares électrique et électro-acoustique accompagnent le prodige. Le style de la formation n?est pas défini par un blues en particulier, mais il a l?avantage de faire voyager du Texas, au Mississipi en passant par l?Illinois. Au niveau musical, ça démarre fort avec une série de blues électriques. En second, ça redescend d?un coup sec avec un mini set électro-acoustique des plus intimiste, avant de finir à grand renfort de watts. La prestation scénique, surtout l?occupation des planches est à mieux maîtriser pour les grandes occasions, mais le public a été entièrement conquis par le charme de cette joyeuse bande et s?est massivement levé afin d?applaudir Charles et ses comparses.
Voici un début de soirée qui commence comme s?était terminé celle d?hier, c?est à dire, tout le monde debout. A peine le temps de ne pas trouver de sandwich, car les crevards avaient déjà tout mangé, que les Electric Kings apparaissent. Et oui ! Parfois les groupes de blues ont des vrais noms et ne prennent pas systématiquement le patronyme du chanteur embelli d?un vocable protubérant.
Les 5 belges ne sont peut-être pas très connus en France, néanmoins ils ont déjà sillonné toute l?Europe ainsi que l?Outre-Atlantique dans les années 90 et viennent tout récemment de se reformer.
Se fut sûrement un des premier groupe européen à constituer un répertoire dans le style swing blues de la West Coast U.S.. Un, deux, trois, quatre? C?est parti et effectivement ça démarre très swing avec la voix puissante et l?harmonica acéré de Big Dave, soutenu par l?excellente rythmique de Willie Maze (à la batterie folle) et de Rc Stock (à la basse). Mais les Electric Kings, c?est aussi un esprit et un son bien particulier, vintage et underground. Très rapidement, leur univers sonore psyché blues s?installe, les morceaux s?allongent et les guitaristes s?en donnent à c?ur joie. Mark Thijs (également connu sous le pseudo de TEE est un formidable guitariste chanteur) et Luke Alexander se partagent des moments de bravoure intérieurs intenses. Luke sait faire marcher sur le ciel un jeu très fin et efficace, percutant l?auditoire, tandis que mister Tee nous fait basculer dans son inconscient paradoxal, notamment grâce à l?emploi de son voice coder distillant des touches 70?s sans pareil. L?originalité des rois électriques semble se complaire dans un liquide amniotique que Roger et Muddy n?auraient pas à renier.
L?atmosphère devient aussi lourde qu?un bus à l?impérial bloqué au sous-sol d?un immeuble anversois inondé par l?Escaut. Pour les non agrégé Es Bizarre, ça peut surprendre mais pour les mordus de surprises psychoprotiques, c?est purement exquis.
L?organisation technique du Bay-Car, a très rapidement su rendre la scène opérationnelle pour l?artiste de clôture, Shemekia Copeland, celle qui promet de nous clouer au fond des cieux. La fille de Johnny Copeland est une grande chanteuse et la présence d?Arthur Neilson à la guitare est pour moi, qui ne l?ai jamais vu live, un vrai bonheur.
Le résultat n?est malheureusement pas à la hauteur du menu et assez rapidement, ce qui s?annonçait comme un septième ciel s?est transformé en troisième dessous tant la performance des musiciens fut mortelle de convention. Attention, rien dans ce qui a été exécuté n?a été ni moche ni répréhensible, mais a été aisément perçu comme mécanique et sans niaque par le public qui, en mal de sensation forte après trois jours de magie sonore, ne s?est pas laissé entraîner dans la facilité du show réalisé par Shemekia et son band.
Les spectateurs du Bay-Car sont maintenant des plus avertis et leur rapide désaffection pour la présente prestation est un message aux mous du genou qui confondent amour du spectacle et promenade au clair de lune surannée. S?il vous plait Shemekia, je sais que tu peux le faire, reviens-nous vite avec un show qui tue, Please !