En première partie de cette soirée franco-rock, la Traverse nous propose un groupe atypique dans le milieu Blues aussi bien que dans le milieu rock.
Les musiciens de ce combo définissent eux même leur musique comme un cocktail composé d'un tiers de Blues, d'un tiers de funky et d'un tiers de rock assaisonné parfois de samples et de rythmes hip hop ; à tel point que certains se demandent si c?est encore du Blues ou définitivement du rock de bonne facture.
Les musiciens de Jesus Volt se disent pourtant adeptes des douze mesures. Leur dernière galette In Stéréo fait l'unanimité de la presse bleue et des webzines blues.
Certes le débat peut être intéressant auprès des puristes et des progressistes mais dans ce cas, je crois qu'il vaut mieux laisser la musique s?exprimer en mettant de côté les querelles de spécialistes pour laisser parler le coeur et l?émotion du public.
Et là, ce soir à la Traverse, il n'y a pas photo : peut importe que les compos de Jesus Volt soient du Blues-funk-rock ou du Rock-funk-blues.
La guitare de Mister Tao galope furieusement en semant ses notes sauvages et ses riffs incisifs, chevauchée par l?harmonica et la voix rauque, parfois saturée, de Lord Tracy. Magic Doudou, aux fûts, et Lenine Mc Donald à la basse domptent l?ensemble d?une rythmique impeccable.
Leur musique, plongeant ses racines dans le Delta et s?appropriant toutes les évolutions musicales jusqu?au plus contemporaines est à la croisé de ce que j?aime.
Ils font passer le blues des campagnes sudistes à des atmosphères modernes et envoûtantes faites de la fureur mécanique, des brumes monoxydées, des soupirs et des râles exhalés du fond de lits défaits, des sortilèges, des révoltes et des rêves de la jungle urbaine.
Frère Toc
22-11-2006
Popa Chubby
Popa Chubby
Big Chubby est comme les saisons. Ses tournées reviennent à l?équinoxe et remplissent tout aussi invariablement les salles où il se produit.
Faisant suite à la sortie d?un triple cd consacré au répertoire de Jimi Hendrix (rien que çà !), Popa investit la scène de la Traverse pour deux heures et demi de concert.
Il est imposant le bonhomme, au propre comme a figuré, au point de n?avoir place que pour lui et les deux musiciens qui l?accompagnent à la basse et à la batterie.
Même si quelques pures oreilles détectent quelques fausses notes de ci ou de là, notre guitar héro fait ce qu?il veut de sa Fender Statocaster de 1965, aussi à l?aise que ma grand-mère avec son fouet à battre le beurre.
Les accents hendrixiens sont là et les fans ne s?y trompent pas, sans laisser oublier toutefois le style propre à Mister Horowitz avec ses avalanches de notes et des chorus aussi brefs que le jour le plus long.
Il y a ceux qui ne supportent pas, ceux qui ont aimé mais qui sont plus gavés que des oies périgourdines et les autres qui guettent chaque date de tournée au sommet de la vigie de leur passion.
En conclusion : le savant mariage d?une musique volubile, d?un large public d?inconditionnels et d?un savoir faire commerciale qui n?échappe pas à Popa Chubby, en bon self made man qu?il est.
Les deux jeunes musiciens accompagnant Popa
Frère Toc
Photos : Christian Rock
24-11-2006
Wilko Johnson
Klim
Klim, le très électrique groupe rouennais, avait ramené quelques furieux de l?agglo de Rouen. Arrivée à la fin de la prestation, il est difficile d?y porter un regard objectif, néanmoins ça envoie du jus et ça redresse les épis rebelles.
La douce Angie Palmer a dû se demander dans quelle chausse-trappe elle s?était fourvoyée. La ravissante anglaise, au répertoire folk-blues, s?est retrouvée coincée entre deux pôles puissants à savoir, Klim et Wilko Johnson. La qualité et la vigueur de son chant, doublé de son accompagnement guitare, martelé de basses bien ponctuées et de percussions précises sur son électro-acoustique ont ravi un public enclin à apprécier une touche féminine et suave entre deux couches beaucoup plus masculines et sonores.
Le dernier mot revient au sublissime guitariste anglais et co-fondateur de Doctor Feelgood, alias l'ineffable sus-nommé Wilko Johnson. Ses riffs endiablés et gymniques ont bercé les années 70 au côté de Lee Brilleaux et restent gravés dans mon esprit. Il a signé les titres historiques de Feelgood, comme: Going back home, Roxette, She does it right, Back in the night et Sneakin? suspicion.
Wilko version 2007, c?est toujours autant de rigueur rythmique et de magie rock. Son sens de la scène et son regard pénétrant m?encense et me font regretter de ne pas l?avoir vu à sa grande époque. Son tour de chant est largement moins convaincant, mais quel plaisir de l?avoir croisé sur une scène locale comme celle de la Traverse. Dans la droite ligne des groupes de pub rock anglais tels Nine Below Zero ou The Inmates, la substance guitaristique de ce prestigieux et inventif musicien, sans compromis ni fioriture, reste intangible, intransigeante et intemporelle.
Angie Palmer
Wilco Johnson & Band
Wilco Johnson
Mad Man
Photos : Christian Rock
25-11-2006
Corey Harris
Corey Harris nous est connu pour avoir participé au film de Martin Scorsese, Du Mississipi au Mali, ou ce dernier s?attache à démontrer le lien entre le blues du sud étasunien avec ses racines africaines. Cette participation était dans la droite ligne des convictions de Corey, toujours à la recherche de ses origines, tant il est convaincu de la relation entre la musique black américaine (blues, soul, R&B, reggae) avec ses racines africaines. Pour son sixième Cd, réalisé en 2003 à la suite du film, il retourne au Mali, pour s?assurer la précieuse collaboration d?Ali Farka Touré ; et ce disque s?appelle d?ailleurs?Mississipi to Mali.
Corey s?installe simplement au devant de la scène et crée rapidement une complicité avec le public, comme s?il était entouré de quelques potes. Cette complicité est d?ailleurs facilitée par sa bonne pratique de la langue française grâce à des séjours en France et aux Cameroun pour des études d?anthropologie, déjà passionné par ses racines.
Il alterne, s?accompagnant d?une guitare acoustique, titres et titres de musiques africaines. Sa simplicité alliée à son talent le rend immédiatement attachant. Cependant, je ne retrouverai pas au cours de sa prestation pourtant plus que sympathique et agréable, l?émotion que m?avait procuré un Keith B. Brown ou la sensibilité plus proche de nous de Roland Tchakounté, ce dernier évoluant avec une démarche très voisine de celle de Corey Harris.
Break, c?est le moment qu?a choisit Mad Man et son Mo Jr, pendant que nous nous épanchons devant le bar, pour revisiter quelques standards de Blues avec sa guitare, son harp et sa boîte en bois (avec un trou dedans pour que le son sorte) sur laquelle, il rythme au pied, tel un métronome pour nous amener doucement mais sûrement vers Boney Fields and The Bone?s Project.
L?homme au chapeau rouge (il doit être The Boss aussi, si, si, il a un ?tit chapeau) est venu jeter son dévolu, que dis-je, répandre avec son band, cuivres, drums, bass, clavier, six musiciens solides, et va falloir marcher droit, on ne rigole pas avec le groove.
Boney fidèle à lui-même, oui oui toujours avec des dreads sous le ?tit chapeau, nous assène un FonkBlues communicatif, jouissif, les musiciens se font plaisir, y?a plus de Boss? C?est l?osmose?
Sa musique est communicative, huilée, avec ce qui ne gâche rien, un très très bon son (bravo les techniciens), en plus dans une salle à taille humaine. L?homme es est à sa troisième galette et n?en finit pas de tourner et de jammer.
Ovation et Boney nous invite à toujours plus de Blues, de Blues, de Blues (thank you, The Wolf). Les lumières se rallument, là non plus on n?a pas vu le temps passer !
Mo Jr et Philippe Adnet ? l harmo
Boney Fields & The Bones Project
Boney Fields
Frère Toc & ZZPat
Photos : Christian Rock
03-12-2006
Plan B
Cette année encore, La Traverse a organisé son tremplin régional, cette année encore, je suis venu voir s?il recèle quelques surprises, d?autant plus que je n?ai jamais entendu parler de deux des groupes présents.
Plan B ouvre le bal avec un Rock Blues chanté en français. C?est propre c?est en place mais ce n?est pas pour moi une surprise puisque je les ai vu il y a peu au Tremplin de Blues Sur Scène où ils ont gagné le prix Sacem et que je les ai vu il y a quelques années sur cette même scène sous le nom Spear It. Depuis Mr Dom à repris le micro laissé vacant par Nathalie mais l?esprit musical n?a pas fondamentalement changé et reste plus proche du Rock des années 80 que du Blues, un peu trop pour vraiment me toucher.
Bumble Bee prend le relais en puissance et à l?énergie, c?est propre c?est bien joué mais il n?y a presque plus de traces de Blues dans leur Rock. Le bassiste et le guitariste s?échangent le chant lead ce qui ouvre un peu la palette des couleurs musicales qu?ils harmonisent avec plaisir. Ils bougent, ils occupent la scène mais encore une fois pour moi, l?émotion n?est pas au rendez vous.
La surprise, pour moi viendra des Noisy Lovers. Voyagent du Chicago Blues au Swing en passant par un Blues lent des plus traditionnels, ils ont mis la salle dans leur poche. Je ne suis pas certain que deux guitares soient nécessaires mais Ronan Huludut et Nicolas Deshayes malgré des sons et des types de jeux différents s?entrechoquent un peu. La basse (Vincent Blivet) et la batterie (David Avrit) tournent rond sans frime et avec efficacité. C?est peut être Nicolas Charier qui a fait pour moi la différence. Une bonne voix et de belles interventions d?harmonica qui ont tiré le tout vers le haut. Bravo messieurs, j?attends maintenant de pouvoir vous voir plus longuement que les vingt minutes de ce tremplin.
Alois Blues Band fermera le bal sur quelques notes parfaitement Blues, mais l?énergie est poussive, le jeu scolaire, les mises en places approximatives et le chant un peu trop limité. C?est un groupe de vieux copains sans autre ambition que de se faire plaisir et c?est probablement ce qui a sauvé leur prestation.
Je n?ai malheureusement pas assisté à la prestation du Beatnicks Blues Club Band chargé d?animer le bar en attendant la mise en place du plateau pour Lynwood Slim qui clôturera la journée.
C?est alimenté et désaltéré que je reprends place dans la salle pour saluer l?arrivée de Julien Bruneteau. J?ai déjà eu l?occasion de dire tout le bien que je pense de son jeu de piano et de sa voix et je n?ajouterai pas ici à la liste des superlatifs que je lui ai déjà attribué. Il a encore confirmé qu?il les mérite amplement. Une prestation solo un peu courte avant qu?il ne soit rejoint par Rosebud Blue Sauce. Je l?ai déjà dis aussi, je suis fan et même si la période avec l?ancien saxophoniste m?a semblé moins excitante, l?arrivée de Ben The Cont Conti aux sax nous a ramené à cette osmose et à cette énergie. Pascal Delmas sur sa batterie et Abdel Bouyousfi sur sa contrebasse me semble plus que complices et Nico Duportal est en grande forme. Ils nous ont présenté quelques titres de leur répertoire qui s?enfonce définitivement dans le Jump et le Rythm?n Blues des années 50, juste avant qu?ils ne donnent naissance au Rock?nRoll ou que T Bone Walker n?ouvre la voie de ce qui deviendra le West Coast Blues.
A l?arrivée de Lynwood Slim, le style s?ouvre un peu mais reste résolument Swing. La fusée décolle à la première note et ne me reposera au sol que quelques heures après la fin du concert. Excellent chanteur, harmoniciste et même flûtiste Lynwood ne prend pas les devants et laisse à chacun la place qui lui revient poussant les solistes à se dépasser, à jouer une grille de plus. Les Rythmiques ronflent, les solos fusent le public est en orbite.
L?ovation est énorme.