La Nuit du Blues organisée par l?association Backstage au Zénith de Caen est devenue en quelques années, un rendez vous incontournable de tout amateur de notes bleues résidant en Normandie.
Peut être même un événement unique en son genre en France, qui rassemble prés de 2000 personnes (entrées payantes et invitations comprises) lors d?une soirée toute entière consacrée à notre musique favorite.
Cette 12eme édition n?a pas dérogé à la règle établie depuis longtemps en donnant la possibilité à un groupe régional d?ouvrir le bal et les cinq compères complices de Midwest ne se sont pas fait prier.
Une p?tite heure passée sur la grande scène va mettre en avant toutes les qualités avérées de cette formation qui sillonne nos contrées depuis 2001.
Leur credo à eux, c?est le Blues joliment teinté de Funk en proportions équilibrés constitué de reprises, de compositions et même, pour l?occasion, de trois inédits encore jamais joués en live !
Bénéficiant d?une rythmique salutaire concoctée par Marc Mitou aux baguettes et Jean Guy Pierozak à la basse, le chant de Jeff Tailpied s?affirme de plus en plus convaincant à chaque sortie et les envolées guitaristiques maîtrisées de Lefty Marco (alias Marc Loison, animateur de la célèbre émission Sweet Home Chicago sur la fréquence 99,1 Mhz de Radio 666) touchent à l?endroit précis où çà procure du plaisir. Il faut ajouter à cela, un nouveau pianiste arrivé depuis peu et bien intégré, Francis Gambini, qui étoffe de ses interventions justes, le répertoire proposé.
La nouvelle mouture de Midwest est certainement la meilleure entendue jusqu?à aujourd?hui et la galette qui doit sortir dans le courant de l?année en sera, sans aucun doute, la meilleure preuve?
En attendant les applaudissements nourris de la salle visiblement conquise ne peuvent que leur donner une furieuse envie de persévérer et de continuer. Yeah, Men, The Blues is Alright !
Pour l?arrivée du Matthew Skoller Band, le public chauffé à blanc est réceptif d?emblée au registre Chicago Blues pur jus puisé principalement parmi les titres de leur dernier album « These Kind of Blues ! », sorti en 2005.
Dés les premières notes, Matthew se positionne comme un harmoniciste intelligent et doué aux phrasés déliés et précis doublé d?un chanteur enjoué et touchant. Son discours pacifiste en français (excusez du peu, m?ssieurs dames) le rend encore plus sympathique, son sens du show bien senti et sa communication incessante avec la salle font de lui un leader charismatique qui sait profiter au maximum du soutien permanent de ses musiciens.
Son frère Larry, équipé d?une somptueuse guitare Gibson, distille un jeu souple, aéré et virtuose qui contrebalance avec celui de Franck Goldwasser (le plus américain des guitaristes français), plus tendu, açéré et puissant.
La section rythmique s?impose d?elle-même, structurée et irréfutable, avec la basse 6 cordes de Charles Mack et la batterie de Marc Wilson. Ces derniers prennent encore une autre dimension lorsqu?ils nous gratifient, l?un et l?autre, d?un solo aussi impressionnant que majestueux.
Au final, un moment vrai de Blues profond et sincère qui ne cherche pas à lorgner sur le terrain du Rock pour s?attirer les lauriers d?un nouvel auditoire?
Comme en témoigne cette magnifique interprétation de « Down at Your Buryin? » écrit par James Cotton, frémissant à souhait de bout en bout.
Et l?assistance ravie le fait savoir à grands coups de frappes dans les mains rythmées et saccadées pour offrir une ovation bien méritée.
Si vous aimez le Chicago Blues et que Matthew Skoller passe prés de chez vous, vous pouvez vous y rendre les yeux fermés avec l?assurance de passer un chaleureux moment, l?occasion ne devrait pas manquer puisqu?il se retrouve souvent à l?affiche de manifestations hexagonales.
Ce qui n?est pas le cas de Mem Shannon qui n?a plus mis les pieds en France depuis sept longues années. Un événement attendu et annoncé qui flaire, dés les premiers instants, la prestation de grande classe.
Accompagné de ses « Membership », Mem Shannon mets en avant, dans ses compositions, ses racines de la Nouvelle Orléans au travers d?une musique riche en influences multiples. Du Blues élégant bien évidemment, mais aussi du Funk vertigineux et de la Soul soyeuse sans négliger un soupçon de Jazz qui se ressent surtout dans la construction subtile et l?interprétation saisissante des morceaux.
Chaque musicien s?exprime avec fougue dans de savoureux chorus (parfois un peu long) et participe allégrement à l?inventivité du style proposé.
Jeff Hebert, installé derrière ses fûts, construit une rythmique infaillible avec l'appui de la basse d?Angelo Nocantelli quand le saxophone Ténor de Tim Green se fait souvent irrésistible et les claviers de Robert Dabon quasiment indispensable.
Mais c?est cette façon d?appréhender la guitare où les nombreuses notes jouées avec une fluidité déconcertante résonnent comme une évidence et surtout cette voix unique et envoûtante, chaude et grave à la fois qui stimule la sensibilité de chacun.
Du bien être s?il en est qui alimente en abondance les réjouissances d?un tel festin?
Et Dieu sait, que Mem Shannon a bien fait d?arrêter son métier de taxi au début des années 90 pour se consacrer pleinement à la musique.
Il n?y a plus qu?à espérer ne pas être obliger d?attendre de nouveau un septennat pour le revoir dans notre beau pays.
Le public, séduit, a manifestement quitté les lieux comblé et rassasié.
Une chose est sûre avec un plateau de la sorte, le bouche à oreilles, sans doute la meilleure des publicités, fonctionnera et nous risquons d?être encore plus nombreux l?an prochain.
En attendant de connaître les artistes de la prochaine édition, il faut remercier Jacques Picard et toute son équipe pour nous avoir permis de vivre de telles émotions?