Voilà maintenant six années consécutives que l?équipe bénévole et passionnée de l?association La Grange de Bougy, située à l?orée de la Suisse Normande à une quinzaine de kilomètres de Caen dans le Calvados, se démène comme de beaux diables pour faire résonner la note bleue tout un week end durant.
Toujours la même formule équilibrée, de deux soirées payantes dans la moiteur estivale de la salle des fêtes joliment décorée (vendredi et samedi soir) avec deux formations à l?affiche et de deux concerts gratuits en plein air (samedi et dimanche après midi) auquel il faut ajouter une session acoustique, le jeudi soir, sous forme de dîner concert au restaurant Le Poivrier d?Evrecy.
C?est le groupe « maison » Midwest, cher au Président Marc Mitou, qui ouvre les débats de cette nouvelle édition du Bougy Blues Festival, présenté, comme d?habitude, par le pétulant Alain Couvé, maître des beaux mots.
Après un changement de personnels (avec deux nouveaux guitaristes et le retrait définitif du pianiste), le combo normand continue sa progression et s?est remis au travail pour concocter une galette toute fraîche.
Leur prestation scénique du soir s?articule à l?essentiel autour des dix titres gravés sur ce nouvel opus intitulé No Smoking. Des reprises appropriées de Dave Gross, Lurrie Bell, Gary Primich, Lonnie Johnson et des compositions affirmées qui se pavanent joliment entre Blues, Funk et Soul.
Toujours les mêmes éléments de satisfaction qui avaient séduit par le passé notamment à la Nuit du Blues au Zénith de Caen, l?assisse rythmique enlevée et imperturbable de Jean Guy Pierozak à la basse et de Marc Mitou aux baguettes, le chant inspiré et puissant de Jeff Tailpied au micro auxquels il faut désormais ajouter les jeux de guitares complémentaires de Laurent Choubrac (transfuge de Caps and Hats) et de Didier Fleury.
Une entrée en matière réjouissante qui a visiblement intéressé l?assistance présente, toujours prête à s?amuser et à danser. Une performance qui promet, sans nul doute, de fort beaux lendemains à Midwest, version 2007.
Du pain bénit pour l?arrivée sur scène de l?Américain Juju Child et de son band, Hypnotic Roots, pour le moins, explosif.
Pas de fioritures, dés les premières notes, la machine infernale et huilée se mets en route et allume la flamme de 90 bonnes minutes de Blues Funky, de Soul Music et d?un soupçon de Musique Latine à la sauce labellisée Juju Child.
Juju Child (de son vrai nom, RJ Williams) compose texte et musique de la plupart des titres captivants et festifs qu?il interprète.
Son chant, chaleureux, persuasif et enjoué, touche le point sensible et les musiciens qui l?accompagnent se donnent, du début à la fin, sans compter.
Romain Dru à la basse et Jean Philippe Oneill s?affirment avec force et détermination, Esther Wilson aux percussions, Fabien Saussaye aux claviers, Claude Imbault à la guitare et Olivier Laudrain au saxophone constituent une ossature adaptée et versatile, jamais avares de solos opportuns et d?échanges bienvenus.
L?ambiance n?a pas faiblit un seul instant et le public s?est régalé de bout en bout, du plaisir audible pour tout le monde à déguster sans retenue? Personne ne s?est fait prier !
Le lendemain après midi dans le camion situé sur le terrain communal à deux pas, le Parisien Yann Cole à la guitare et au chant accompagné de Julien Audigier à la batterie et de Laurian Daire à l?orgue et au clavier ont illuminé un authentique hommage à la musique bleue.
Des standards revisités et des reprises assimilées de BB King, Robert Cray et Eric Clapton (entre autres) parfois enrichis par une pointe de Jazz et de Rock, dans un format original, constituent la trame principale d?une prestation rayonnante.
Chant trépidant et ch?urs soyeux sur fond de jeu de guitare maîtrisé aux doigts comme au bottleneck, nappes d?orgues somptueuses et précises embellies par des envolées célestes de baguettes s?inscrivent comme une réussite indéniable.
De quoi satisfaire amplement l?auditoire allongé sur le gazon frais et ensoleillé.
Nous avions vu Mountain Men 20 minutes à Blues sur Seine et nous étions resté sur notre faim. C?est donc avec impatience que nous attendions ce moment de la deuxième soirée.
Nous attendions beaucoup, nous avons eu encore plus.
Plus de performance musicale avec la guitare Mathieu ?Mat? Guillou, puissante et efficace sans verser dans la démonstration. Chaque note à un sens, un but, elle est au service de la chanson et sert de support aux solos d?harmo de Ian « Barefoot Iano » Giddey. Comme pour la guitare, chaque solo d?harmo permet de consolider la chanson, d?appuyer le chant ou de sublimer l?ambiance sans se mettre en avant.
Plus d?émotions, principalement portées par la voix puissante profonde et hypnotique de Mat. Il va chercher si profond en lui qu?il semble prêt à en pleurer à chaque phrase et la moitié de la salle devait en être au même point après deux titres.
Plus de théâtre aussi, puisqu?au-delà de la musique, c?est une véritable pièce qu?ils nous jouent. Avec sa mise en scène, ses personnages et un humour salvateur, qui leur permet de détendre un peu le public et lui éviter ainsi de succomber aux émotions véhiculées par leur musique.
Et pour finir, plus de frustrations, puisque qu?après leur prestation, nous en voulions encore.
Connie Lush & The Blues Shooter est aussi au programme ce samedi soir. Connie Lush, cette blonde anglaise, forte, à la voix « black » s?est fait connaître, en France, à la sortie de son album « Live au Royal Albert Hall London », sortie en juillet 98.
La dame nous offre un show un peu dans l?esprit de l?américaine Candy Kane pêchu avec des blues inquisiteurs.
Sûr que Connie, possédée par son Blues, n?a pas froid aux yeux et se donne à 100%.
Malgré un changement de line up avec la présence de Peter Wade à la guitare et Paul Tsamos à la batterie (sauf pour son mari, Terry Harris, toujours à la basse) et même si elle n?innove pas (beaucoup de reprises) elle nous offre un set très agréable. L?assistance s?est délectée et en a redemandée encore et encore? Enfin, pour son second disque : tout faux !! Connie n?en avait pas amené?
Mais Bougy n?est pas fini, le lendemain il y a les Honeymen, super? et eux, ils ont des skeuds !!!
Juke Joint Special est le dernier en date, 12 titres principalement interprétés au long de leur set sur le terrain communal sous un soleil toujours aussi radieux.
Voilà un trio, venu de Quimper, (Jimmy Jazz, guitare et chant, Elmor Jazz, harmonica et chant, Jacques Moreau aux percussions) qui connaît la musique et sait ce que le mot Blues veut dire.
Des morceaux savoureux, hypnotiques et fascinants en adéquation avec leur dynamisme bien réel et leur sincérité jamais bafouée. A l?arrivée, un voyage initiatique jusqu?aux racines du Blues puisé de l?Afrique à l?Amérique auprès de grands noms comme Willie Dixon, Robert Johnson, Jimmie Vaughan ou encore Jimmy Reed et des compositions dans le même esprit.
Du plaisir pour tout le monde et une ovation aussi nourrie que méritée, la preuve : leurs galettes se sont vendues sans compter?
Une fois de plus, le Bougy Blues Festival a réussit son objectif, fidéliser un public bigarré, entre férus et novices, favorable à la découverte, disposé à se distraire et à faire bouger les choses.
Un grand merci à tous, municipalité complice de toujours et fervents organisateurs enthousiastes.
Vivement l?année prochaine pour de nouvelles aventures !
Laurent Choubrac
Didier Fleury
Juju Child
Juju Child & The Hypnotic Roots
Romain Dru
Yann Cole
Yann Cole entour? de Julien Audigier et Laurian Daire